Introduction:
Cet essai a pour but une vue générale sur la situation actuelle de l’égalité femmes- hommes en éducation et la façon d’améliorer les disparités de genre dans le domaine de l’éducation, au niveau international et national. Cet essai se concentre sur le niveau international et national.Il s’intéresse aux mécanismes internationaux et nationaux de la responsabilité des gouvernements, sur l’activisme de la société civile et sur les plans d’éducation crédibles.
1- Situation actuelle:
L’UNICEF a souligné que l’éducation offre aux enfants un moyen de sortir de la pauvreté et une ouverture pour un futur prometteur. Cependant, Environ 264 millions d’enfants et d’adolescents n’ont pas l’opportunité d’aller à l’école ou de terminer leur scolarité. Ils en sont empêchés par pauvreté, discrimination, conflits armés, ou d’autres urgences.
Selon l’UNESCO 63 millions d’enfants en âge d’aller au primaire (6-11 ans) n’y ont pas accès. Parmi ceux-ci 34 millions sont des filles. En 2000, 58 % des 100 millions d’enfants non scolarisés étaient des filles. En 2016 ce pourcentage est tombé à 54% ce qui signifie que 10 % des filles en âge du primaire ne vont pas à l’école, par comparaison aux 8 % de garçons. De plus cette moyenne générale ne montre pas les différences au niveau régional et par pays.
Les filles en âge du primaire présentent un désavantage dans la plupart des régions sauf en Amérique latine, aux Caraïbes, en Europe et en Amérique du Nord où ce sont les garçons qui sont la plupart du temps non scolarisés. En 2016 le quota de garçons non scolarisé était de 4,1 % (1,4 million) alors que celui des filles était de 3,4 % (1,1 million). En Amérique latine et aux Caraïbes en 2016 le quota de garçons non scolarisés était de 5,5 % (1,7 million) quand celui des filles était de 4,4 % (1,3 million). En Asie, les filles ont encore plus de problèmes pour fréquenter l’école. Ainsi, en 2016, en Asie du Sud 6,4 % (5,6 millions) des filles n’allaient pas à l’école, comparé au quota des garçons de 4,9 % (4,7 millions). L’Afrique Subsaharienne est la région qui a les plus grandes disparités de genre. Il y a 56 % d’enfants et 53 % de jeunes non scolarisés. En Afrique du Nord et en Asie de l’Ouest 12 % de filles ne vont pas à l’école comparé aux10 % de garçons. Dans les neuf pays qui suivent, le quota des filles non scolarisées est au moins supérieur de 10% à celui des garçons: Angola, Bénin, République Centrafricaine, Tchad, Guinée, Nigéria, Pakistan, Sud Soudan et Yémen. De plus, plus de la moitié des filles d’âge primaire ne vont pas à école en Érythrée, Guinée équatoriale, Libéria et au Sud Soudan.
Au niveau global, les quotas entre les femmes et les hommes non scolarisés, sont pratiquement identiques. Pourtant cette moyenne ne prend pas en compte les différences entre les régions. Par exemple en Afrique du Nord et en Asie de l’Ouest 16 % des adolescentes sont encore exclues du système scolaire en comparaison des 11 % de garçons, alors qu’en Afrique Subsaharienne le pourcentage d’exclusion est de 39 % comparé aux 35 % de garçons En Amérique latine, aux Caraïbes, en Asie du Sud, en Europe et en Amérique du Nord ce sont les adolescents qui sont désavantagés dans leur cursus scolaire. En Europe et en Amérique du Nord en 2016 le pourcentage de garçons (d’âge, début du secondaire) était de 2,4 % (0,5 millions) par rapport aux 1,9 %(0,4 millions) de filles. En Amérique latine et dans les Caraïbes le pourcentage de garçons non scolarisés était de 7,9 % (1,5 million) tandis que celui des filles était de 7,2 % (1,3 million). En outre en Asie du Sud le quota des garçons scolarisés était de 18,3 % (10,2 millions) et celui des filles de 15,9 % (8 millions). De plus en Asie de l’Est et du Sud-Est le taux de garçons non scolarisés était plus élevé 9,3 % (4,4 millions) que celui des filles 8,6 % (3,6 millions). L’Océanie se rapproche plus de l’égalité garçons-filles pour les enfants en âge de fréquenter les classes les plus basses du secondaire.
Contexte politique et juridique:
La communauté internationale s’est engagée à réaliser l’égalité entre les femmes et les hommes depuis la création des Nations Unies. Le premier chapitre de la Charte des Nations Unies déclare qu’un des objectifs de l’organisation est de réaliser une coopération internationale en promouvant et en encourageant le respect des droits humains et des libertés fondamentales de tous, sans distinction de race, de sexe ,de langage ni de religion (Nations Unies – 1945). Depuis la formulation de la charte des Nations unies Les pays ont accru leur engagement politique et juridique en faveur de l’égalité des sexes en éducation.
L’ ordre du jour de 2030 pour le Développement Durable demande aux pays de prendre en compte l’égalité des sexes dans chacun des 17 objectifs du Développement Durable (ODD). De tous ces objectifs, L’ODD 4 sur une éducation de qualité et l’ODD 5 sur l’égalité des sexes insistent sur la qualité en éducation. L’ODD 4 exige une éducation inclusive et équitable de bonne qualité et l’ODD5 a pour but l’égalité femmes-hommes et l’autonomisation les femmes et des filles. L’objectif de l’ODD5 inclut l’élimination de toutes les formes de discrimination, de violence de genre et du mariage d’enfants. Il inclut la participation des femmes à tous les niveaux de décision et prévoit l’accès universel aux services de l’éducation sexuelle et reproductive.
Le cadre d’Action de l’Education 2030, ligne directrice internationale de la communauté pour la réussite de l’ODD 4, déclare que l’égalité de genre est fondamentale si le droit à l’éducation est étendu à tous. Selon ce cadre, les gouvernements doivent promouvoir des politiques sensibles au genre dans leurs plans et leurs environnements éducatifs, ce qui implique d’éliminer la discrimination et la violence de genre et de procurer formation et aide aux enseignants par la possibilité d’une éducation sensible à l’égalité femmes- hommes. Il est cependant important de se rappeler que l’agenda 2030 n’est pas légalement contraignant.
Les obligations légales des états sur l’éducation dérivent des traités internationaux légalement contraignants, qui soulignent les responsabilités des gouvernements au respect, à la protection et au droit à l’éducation. Les états doivent s’abstenir de violer le droit à l’éducation. La protection du droit à l’éducation indique que les états doivent assurer que des tierces parties n’empêchent pas l’accès égal à l’éducation et sa pleine jouissance . De plus le respect du droit à l’éducation impose aux états d’adopter des mesures législatives, administratives, budgétaires, judiciaires et autres pour la pleine réalisation de ce droit. Tous les pays ont ratifié au moins un traité qui protège les droits à une protection de l’éducation.
Trois traités mondiaux sont vraiment importants pour l’égalité de genre en éducation. Le premier est la Convention sur l’Elimination de Toutes les Formes de Discrimination Envers les Femmes de 1979 (CEDEF). Ce traité est considéré comme le traité le plus spécifique et le plus valable on ce qui concerne les obligations légales des états sur l’égalité de genre dans l’éducation. L’article 10 de la CEDEF souligne les obligations et établit des normes acceptables, telles que l’égalité d’accès à l’éducation et à une éducation de qualité, la réduction du taux d’abandon féminin, et des programmes pour les femmes et les filles qui ont quitté l’école prématurément ainsi qu’un accès à une information éducative sur la santé et le planning familial; quant à l’article 16, il interdit les mariages d’enfants. Cependant si 189 états ont ratifié la CEDEF, bien des pays ont émis des réserves, ce qui minimise leur engagement au traité.
Deuxièmement: la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans l’Enseignement (CADE) est le seul traité spécialisé dans le domaine de l’éducation. Il est aussi considéré comme le traité le plus complet en ce qui concerne la discrimination en éducation. La CADE interdit toutes formes de discrimination et cela inclut le genre. De plus, elle se concentre sur la discrimination, aussi bien en accès qu’en qualité d’éducation.
Troisièmement : les articles 13 et 14 du Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels (CIEDSC) sont souvent reconnus comme à la base du droit légal à l’éducation. Le comité de surveillance du traité a souligné les pratiques des états, nécessaires au changement pour éliminer les discriminations, ce qui demande une grande surveillance ainsi que des données ventilées pour identifier les sortes de discriminations énoncées à l’article 13.
Comment atteindre l’Égalité femmes-hommes en éducation?
Bien que les états acceptent en principe la responsabilité de garantir le droit à l’égalité femmes – hommes en éducation, des pratiques discriminatoires basées sur le genre existent encore. ONGs et citoyen(e)s peuvent se servir des lois internationales et nationales et des filières de la société civile pour se faire entendre et faire prendre aux gouvernements leurs responsabilités. Les filières internationales et nationales sont associées aux organes conventionnels de Droits Humains, aux parlements et aux institutions indépendantes tandis que les filières de la société civile impliquent les groupes de la société civile; y compris ceux qui s’occupent des problèmes de droits des femmes.
3.1 Mécanismes internationaux qui peuvent mettre les gouvernements devant leurs responsabilités:
Les gouvernements peuvent être tenus pour responsable dans deux types de cas en ce qui concerne les traités. Premièrement, les parties autorisées peuvent être en mesure d’apporter leurs plaintes directement au Comité qui s’occupe du suivi du traité. Deuxièmement, on peut demander aux parties tierces de demander au Comité un rapport sur les progrès du respect des engagements.
D’autre part, il est possible de demander aux parties tierces d’informer le Comité lors du processus d’examen d’un pays.
La meilleure façon de tenir les gouvernements pour responsables de leurs engagements en ce qui concerne l’éducation, c’est le dépôt de plaintes, de communications, de pétitions, de réclamations par toute personne qui se sent atteinte dans ses droits par un état. Les comités de surveillance de CEDEF, PIDESC et CADE ont des mécanismes de dépôt de plaintes.
Le Comité sur l’Elimination de toute Discrimination Envers les Femmes surveille la mise en œuvre de la CEDEF, ce qui signifie que ce comité est l’Organe des traités de l’ONU le plus susceptible de recevoir un dépôt de plainte sur l’inégalité femmes -hommes en éducation. Bien que les organes de traités de l’ONU aient eu à gérer un petit nombre de plaintes ou de communications sur le droit à l’éducation, aucun des organismes de traités n’a encore statué sur un cas concret de discrimination de genre en éducation. Cependant le Comité de la CEDEF a adopté des décisions concernant l’égalité filles- garçons en éducation.
Les pays doivent présenter un rapport périodique sur les mesures prises pour répondre à leurs obligations. Lors du dernier rapport de la CADE qui a eu lieu en 2013, 40 sur 50 des pays ont informé de changements politiques importants. Par exemple, au Bahreïn, des écoles maternelles ont été ouvertes en centres d’éducation continue, pour offrir un espace de garde d’enfants tandis que les parents poursuivaient leurs études. Au Bangladesh, le programme allocation femme a été étendu à l’enseignement secondaire supérieur, permettant ainsi aux 3.9millions d”étudiantes de recevoir une allocation pour prolonger leur éducation.
De plus les organisations non-gouvernementales (NGOs) ont reçu la possibilité, lors des examens par pays, de soumettre des informations sur les violations aux droits commis par les états. Les rapports des ONGs. sont dits rapports alternatifs ou parallèles et ils apportent la parole locale dans l’arène internationale.
Dans l’ensemble, les multiples voies offertes par les traités internationaux sont sous- utilisées pour ce qui est de rendre les pays responsables de l’égalité femmes – hommes en éducation. Bien que l’absence d’une autorité d’exécution des lois limite la quantité des rapports nationaux sur les objectifs des traités, la pression normative pour assurer les engagements a permis des progrès dans certains pays. Ainsi, des citoyens et les organisations de la société civile peuvent utiliser plus souvent ces mesures pour souligner des exemples de discrimination et de ségrégation puisque des recommandations du comité et la surveillance du public peuvent inciter les gouvernements à agir.
3.2 Mécanismes nationaux pouvant tenir les gouvernements pour responsables:
Des institutions indépendantes peuvent aussi présenter d’autres voies aux citoyen(e)s et contribuer aux plaintes. les Institutions Nationales de droits humains (INDH)et leurs bureaux de médiateurs sont assignés à signaler les plaintes qui impliquent des violations de droits humains et à recommander des remédiassions. En 2010, 118 pays avaient des bureaux de médiation. Ainsi, en Finlande le Médiateur pour l’Egalité supervise la conformité à la loi sur l’Egalité entre les femmes et les hommes. Le bureau du médiateur finnois étudie les enquêtes et les plaintes de genre touchant l’emploi, l’éducation, le logement et les services. De plus les audits de genre, faits par les institutions d’audits indépendants peuvent aussi ajouter à la pression exercée sur les gouvernements.
3.3 L’activisme de la Société Civile:
Les systèmes de responsabilisation, y compris les mouvements de la société civile fournissent un boulevard aux citoyens pour des dépôts de plaintes. Les activistes de bien des pays ont joué un grand rôle dans la tenue de leurs gouvernements pour responsable de leurs engagements.
Des campagnes pour les droits des femmes sont souvent organisées par les ONGs, parfois avec les gouvernements et les autorités locales. Par exemple, en Afghanistan, au Népal et au Pakistan le support de chefs religieux et locaux à aidé à changer les attitudes de leur communautés envers les droits à l’éducation des filles.
Les progrès peuvent encore être accélérés par des ONGs internationales axées sur l’égalité des sexes. Quelques exemples de ces ONGs et de leurs campagnes se trouvent être: la Campagne pour l’Education des Filles et MenEngage Alliance and women Deliver. De plus la campagne HeforShe lancée par ONU -femmes en 2014 est axée sur l’engagement des hommes à devenir des agents de changement et à aider à parvenir à l’égalité des sexes en éducation. Cette campagne a aussi développé des programmes destinés à lutter contre la violence sexiste dans les universités.
Les médias sociaux sont de plus en plus utilisés pour attirer l’attention sur les problèmes de genre, la responsabilité des gouvernements et des autres parties prenantes et à donner de la visibilité à la société civile. L’activisme Hashtag peut aussi aider à porter à la conscience mondiale, les problèmes locaux. Ainsi, la campagne #BringBackOurGirls à porté l’attention sur le kidnapping de plus de 250 élèves du secondaire, dans l’État de Borno au Nigéria en 2014.
3.4 Plans d’éducation crédibles:
Les gouvernements ont des obligations politiques et légales et mettent en œuvre la politique éducative, dans la limite de leurs ressources.
Les gouvernements sont tenus de protéger le droit à l’égalité de genre en éducation et de fournir des services éducatifs équitables en genre.
Il n’y a pas de façon unique pour les gouvernements, d’assurer l’égalité femmes-hommes en éducation. Il est aussi important de se rappeler que les gouvernements ne sont pas des acteurs uniformes, ils se composent de plusieurs secteurs, départements, niveaux et autorités ayant des niveaux variés de capacité. De plus, les états fragiles, post – conflit et post- reconstruction sont, en général, dans une position de plus grande faiblesse pour adopter et appliquer ces politiques.
Pour la responsabilisation des promesses des gouvernements sur l’égalité de genre en éducation, un instrument clé se trouve être dans des plans d’enseignement crédibles. Ces plans d’enseignement crédibles doivent identifier des lignes de responsabilité claires, être financés convenablement, et avoir un budget transparent. Les plans d’enseignement pour la promotion de la coordination entre les différents organes du gouvernement peuvent rassembler différents ministères pour s’attaquer à la multitude de défis qui la plupart du temps restreignent l’Éducation des filles. L’implication de différentes parties prenantes peut aider à assurer que les plans incluent des stratégies aux budgets adéquats et des politiques qui font progresser l’égalité de genre.
Pourtant, l’existence d’un enseignement qui répond à certains critères n’est en aucun cas une garantie de réussite. Ainsi, l’Afghanistan a un plan sensible au genre. Celui-ci reconnaît l’importance de professeurs femmes, ce qui facilite l’inscription et le recrutement des filles. De plus le ministère de l’éducation produit des éléments incitatifs pour attirer plus d’enseignantes et ce notamment dans les régions rurales. Malheureusement cette stratégie n’a apporté que peu de différence: un cinquième de la totalité des districts n’a pas de femme qui enseigne.
Selon le Rapport Mondial de Surveillance de l’Education2018 chaque étape d’un plan d’éducation devrait être considéré à la lumière du genre, Tout d’abord une évaluation genrée devrait mesurer les implications potentielles du genre dans cette politique. Deuxièmement, un budget genré devrait s’assurer que les ressources ont bien été ciblées et équitablement distribuées. Troisièmement, différentes parties prenantes devraient être inclues lors de l’examen du plan ou de la politique pour ce qui concerne l’intention initiale et l’identification de préjugés ou de discrimination explicites ou cachés. Enfin, un rapport sur la mise en œuvre de cette politique et de ses résultats, incluant une analyse du genre et des données ventilées par sexe devrait être préparée et publiée à un plus vaste public.
Cet essai a fait l’objet de recherches et a été écrit par
VIilja Härkönen,stagiaire au secrétariat de l’IAIF à Athènes,
sous la supervision de Joanna Manganara, présidente de l’AIF.